C’est par un courrier aux élus des 72 communes concernées que le bureau de l’association des médecins qui gére la maison de garde Peyssies avait tiré la sonnette d’alarme. Ce courrier faisait état d’une fermeture probable si au 1er février 2016, une participation financière n’était pas versée par les collectivités. Faire appel à l’argent public est-il dans l’ordre des choses et le maintien de la maison de garde de Peyssies, qui concerne 50 000 patients, est-elle justifiée ? Nous avons rencontré ces médecins qui veulent donner une dimension militante à leur action.
Leur porte parole, statut non revendiqué par l’intéressé, est le docteur Philippe Poinot de Carbonne. Médecin généraliste engagé, le docteur Philippe Poinot est un humaniste qui milite au sein de l’association Colibri chère à Pierre Rabhi. Vice président de l’association de régulation de permanence des soins de la Haute Garonne, il est également l’un des rares médecin commandant des sapeurs pompiers du SDIS 31. Formé à la médecine des catastrophes, il est très sensibilisé à l’aide humanitaire et aux secours sur les terrains d’événements catastrophiques.
La maison de garde de Peyssies va-t-elle fermée ses portes comme un temps envisagé en cas de non participation des collectivités territoriales ? Quels ont été les engagements des collectivités pour motiver votre décision ?
La MMG fermera ses portes si elle est en faillite et surtout si les médecins sont les seuls à se battre pour elle.
Bilan de la trésorière ce jour :
– subventions versées en 2015: Carbonne 1052, Salles sur Garonne 264€, Marignac Lasclares 210€, CCLT 565€, Montesquieu 640€, Cazeres 250€, St Sulpice sur Leze 390,60€, Rieux 530,80€, Bois de la pierre 210€, Peyssies 272€, St Elix 160€ soit un total de 4544,40€
En sachant que ces cotisations nous ont été versées à partir d’avril et que pour la plupart, elles l’ont été en décembre suite à notre intervention.
Aujourd’hui, aucune subvention n’a été versée en 2016, il nous reste 688€ sur le compte en sachant que j’envoie la paye de la secrétaire (240€) et que le mois prochain je dois payer le loyer (300€)…
Promesses chiffrées 2016 pas de date :
Communautés de communes du canton de Cazères : 2541€
Promesses 2016 mais pas de montant ni de date
Communautés de communes Louge et Touch
En attente de décision :
Communautés de communes du Volvestre
Aucune réponse
Communauté de commune Garonne Louge –
Communauté de communes des Terres d’Aurignac
Si l’on fait le calcul des sommes peu importantes au fond que vous demandez aux collectivités (0,20 centimes d’euros par habitants), on pourrait penser qu’en les divisant par la quarantaine de médecins que vous êtes, il était peut être inutile de faire appel à l’argent public. Les motivations ne seraient elles pas d’une autre dimension?
Collectivement les médecins volontaires financent la partie médicale de la MMG à hauteur de 3500€ par an et nous demandons 20 centimes par habitants pour financer la part service public (loyer, charges et secrétaire).
Il y a dans notre action une dimension militante. La médecine générale s’effondre lentement, les départs à la retraite ne sont plus remplacés.
La bonne organisation des gardes sur un territoire est une des conditions indispensables à l’installation de jeunes médecins. Nous pensons que le combat pour créer et faire vivre une Maison de Garde est un effort collectif pour les médecins et pour les élus.
Les patients ou les citoyens ont du mal à faire la part des choses en ce qui concerne la différence qu’il faut faire entre votre statut de « profession libérale » et celui de » acteur de service public ». Ou commence et ou s’arrête cette frontière?
Les médecins généralistes exercent sous le statut de profession « libérale ». Il serait plus juste de dire profession « encadrée ». En semaine de 8h à 20h votre médecin traitant se doit assurer la continuité des soins pour ses patients et pour d’éventuelles urgences.En cas d’absence, les médecins doivent déléguer la charge de leurs patients à un confrère ou un remplaçant.
De 20h à 8h en semaine, et du samedi 12h au dimanche 8h ce sont les gardes médicales. Elles sont organisées par l’Etat et c’est le centre de régulation qui appelle le médecin de garde. C’est dans cette période que le médecin est pleinement acteur d’une mission de service public.
Si avant 2004 patients et médecins n’avaient pas fait « open bar » en ce qui concerne les visites à domicile, je suppose qu’on n’en serait pas là?
Avant 2004, il n’y avait aucune limite à l’appel d’un médecin de garde pour quelque motif que ce soit. Il y a 6 fois moins d’actes de gardes avec la nouvelle organisation. 65% des appels sont résolus par un conseil médical donné par le médecin régulateur.
Si l’on se compare à d’autres pays européens, comment peut on situer le système de garde français?
Nous sommes une exception, Il n’y a qu’en France ou les médecins se déplacent au domicile des patients. Dans la plupart des pays européens, les patients se déplacent par leurs propres moyens dans les services urgences ou par ambulance privée. En France le tiers payant est possible pour les actes de gardes. Les transports ambulanciers de garde sont également pris en charge pour les hospitalisations.
Dans certains pays, il existe des service de garde comparable au notre mais privés et réservés aux plus fortunés.
Les gardes sont-elles d’une part obligatoire à titre service rendu mais organisées sur le volontariat des médecins? Une ambiguïté supplémentaire qui pose la question de : Que se passerait-il si il n’y avait aucun médecin volontaire ou pas assez pour assure une garde efficace. ?
Chaque territoire ou zone de garde a l’obligation de fournir à la préfecture un tableau de gardes. Juridiquement c’est sur la base du volontariat, mais si il n’y a pas de volontaire la préfecture réquisitionne un médecin du secteur.
Docteur, n’êtes vous pas des agents de l’Etat, puisque rémunéré au fond par les caisses, qui n’aurait pas droit aux 35 heures et aux congés payés?
La question peut se poser, surtout dans la mesure ou le tiers payant se généralise. Mais si nous passions de 60h en moyenne par semaine à 35 heures ; avec des temps de récupération après les gardes. L’accès aux soins serait quasiment impossible.
Le fonctionnement de la maison de garde de Peyssies s’arrête à minuit. Pourquoi? Et que se passe-t-il si un patient appelle à 1 heure du matin?
Les études sur les appels montrent qu’il n’y a que 3 à 4 appels entre minuit et 8 h du matin sur le bassin de santé. 3 cas sur 4 sont résolus par des conseils, pour 1 cas sur 4 les patients sont transportés aux urgences par ambulance.
Combien de médecins sont-ils volontaires pour prendre la garde de médecin mobile? sont ils tous généralistes? Combien de médecin activés chaque soir et pour quel territoire?
Sur le bassin de Muret qui va de Portet à Boussens et de Cintegabelle à Rieumes., il y a une vingtaine de médecins généralistes qui font des gardes de médecins mobiles. Actuellement cela suffit. Sa mission est d’effectuer les visites indispensables auprès des patients. Ils travaillent les fins de semaine et les jours fériés pour 25 visites en moyenne par WE.
Le Medecin Mobile n’aurait pas pu être crée sans la mise en place des MMG de Peyssies et de Frouzins. C’est un problème de cohérence. On ne peut pas être contre la MMG et applaudir au Médecin Mobile.
Les maisons pluri-professionnelles se généralisent y compris dans le Volvestre et c’est visiblement la solution d’avenir préconisée. Une totalement sur fond privé sera effective au mois de mars à Rieux. Votre cabinet de médecins va également en faire une très prochainement. Selon nos sources, les médecins de Rieux ou tout au moins une partie vont prendre leur garde dans cette maison. Pourquoi lorsque la votre sera faite ne pas faire la même chose et dans ce cas à quoi sert de maintenir la maison de garde de Peyssies?
Il n’y a aucun lien entre l’organisation des soins quotidiens à travers des Maisons de santé, des groupes médicaux ou des médecins travaillants seuls et le système de garde qui est collectif, public et territorial. Une MMG (Maison Médicale de Garde) ne peut être dans une Maison de Santé.
La situation idéale pour le patient ne serait elle d’avoir les consultations de jour comme de nuit dans une maison pluri-professionnelles de garde à tour de rôle et une ou des pharmacies implantées juste à côté pour éviter quelques parcours du combattant?
L’idéal dont vous parlez était la réalité il y a 15 ans quand il y avait beaucoup de médecins et que les finances publiques n’avaient pas de limites. Actuellement, la bataille est de faire venir des médecins et de faire au mieux avec les contraintes budgétaires de l’état. C’est pour cela qu’il y a des médecins militants qui croient qu’une action collective doit être maintenue.
Pour les pharmacies, c’est le même problème : personne n’est obligé à se lancer dans une action de groupe au service d’un territoire. Il faut leur poser la question de se rassembler pour faire une pharmacie de garde à coté de la maison médicale de garde.
Au fond quelle est la question fondamentale ?
La question qui se pose concrètement ici et maintenant, est le choix de se battre pour cette MMG comme nous le faisons depuis 4 ans pour un idéal de service aux patients ou de laisser tomber et de revenir dans le minimum légal : faire des gardes dans nos cabinets médicaux dispersés aux quatre coins du Volvestre. Pour nous c’est le plus simple mais certainement pas le plus éthique. Le dossier est dans les mains des élus, Il y a urgence à savoir si les responsables politiques veulent également se battre pour ce projet.
Nous appelons, avec le conseil départemental de l’ordre des médecins, à une grande réflexion collective sur l’organisation des gardes et sur l’explication de ses gardes aux usagers. Il faut définir un cadre clair pour l’avenir et des explications lisibles pour tous. C’est pourquoi il faut mettre autour de la table, usagers, Agence régionale de la santé, Union Régionale des Médecins, Conseil de l’ordre des Médecins et élus.
Le Bureau de la MMG de Peyssies
Dr Chamberlin Cazeres /Dr Duchein Le Fousseret /Dr RenardCot Carbonne / Dr Poinot Carbonne
Et si on avait commencé par cela ! Mettre autour d’une table, l’ensemble des partenaires concernés par les gardes dont un collectif d’usagers qui représenteraient les patients.
« Il n’est jamais trop tard pour bien faire » dit le proverbe