Editorial Yannick Foucaud
Il n’y a pas une seule journée où les médias ou les réseaux sociaux ne rendent comptent d’une situation qui met directement en cause la Justice et ses serviteurs que sont les magistrats. Qu’en est-il réellement ?
Selon notre principe d’État de droit qui prévoit la séparation des pouvoirs, les magistrats, et par extension le jury populaire en cour d’assises, rendent la Justice en toute indépendance du pouvoir. Ils se basent sur des textes de Loi votés par le législateur à savoir le Parlement et le Sénat. Chaque article du Code pénal contient avec précision les éléments constitutifs de l’infraction et les peines encourues par l’auteur reconnu des faits. Dans le cadre du principe du droit français de la personnalisation de la peine, le texte prévoit obligatoirement une peine minimum et une peine maximum. Le magistrat doit donc obligatoirement prononcer une peine qui se situe entre ces deux barrières qu’il ne peut franchir. S’il choisit de prononcer une peine qui se situe au minimum du texte il applique simplement la Loi qui, rappelons-le, a été faite par nos parlementaires. Sa décision est prise en fonction des circonstances de la commission des faits et du parcours de l’auteur présumé. Il agit avec raison et non dans l’émotion qui peut envahir une victime ou une opinion publique toujours encline à désigner un coupable si une décision ne va pas dans son sens.
Si l’un des 3 éléments constitutifs n’est pas présent, si une faute de procédure a été commise lors de la phase enquête par un service de police ou gendarmerie ou un magistrat instructeur par exemple, le Juge sera contraint de prononcer la relaxe de la personne soupçonnée car le droit n’aura pas été respecté. Cette décision peut engendrer de vives émotions compréhensibles mais il n’est est pas reponsable.
Des lois qui s’adaptent en permanence
La société évolue en permanence et les textes de Loi changent au fur et à mesure de ces évolutions. Elle est donc toujours forcément à la traîne puisqu’elle est contrainte de s’adapter en permanence. Souvenons-nous que l’homosexualité était une infraction il n’y a que quelques dizaines d’années seulement ! Le caillassage des véhicules de pompiers n’existait pas il y a 50 ans dans les banlieues ! Les enfants de 13 ans n’étaient pas les mêmes à la sortie de la guerre que ceux de maintenant et pourtant l’esprit de l’ordonnance de 1945 est toujours bien présent dans la gestion judiciaire des mineurs. Députés et sénateurs ont donc en charge de faire évoluer les textes de Loi pour les rendre intelligibles par une société qui choisit la facilité de prendre comme bouc émissaire des magistrats qui ne font qu’appliquer des textes dont la rédaction ne leur incombe pas ! Ne nous trompons pas de cibles.
Une justice sinistrée et non respectée.
L’institution Justice est sinistrée et manque considérablement de moyens. Du coup des délais trop longs et tout un tas de dysfonctionnements qui rend les citoyens très critiques. Encore une fois cette institution ne peut fonctionner qu’avec les moyens que lui donne les politiques. Actuellement en grand renfort de com pour rassurer une opinion publique en demande de sécurité on nous dit qu’il va y avoir 10000 postes de policiers et de gendarmes en plus ! Combien de magistrats en plus pour rendre une meilleure Justice ? Circulez il n’y a rien à voir cela n’intéresse personne mais on continuera à proclamer haut et fort que les magistrats sont à la solde des voyous.
Un mélange des genres
Tout est simple quand la chaîne pénale est respectée, à savoir policiers et gendarmes font les enquêtes et les transmettent à la justice qui prononce de jugements, chacun restant bien dans sa partie. Les premiers constatent les seconds jugent dans un respect démocratique. Cela se complique quand des policiers accusent des juges car en plus d’être des enquêteurs ils endossent la qualité de victimes. Ils stigmatisent alors les magistrats les traitant de laxistes ou d’autres noms d’oiseau quand ils sont en privé. Ils oublient d’ailleurs au passage que la Loi est faite par le législateur et non les magistrats qui ne font que l’appliquer. En revanche quand ces policiers deviennent des auteurs présumés ils dénigrent ces mêmes hommes de Loi les trouvant trop injustes ou sévères les traitants, insulte suprême, de juge rouge. Le Juge dans ses fonctions n’est ni dans l’émotion d’une victime ou le ressenti d’un présumé coupable, il est dans la raison. Étant humain il peut toujours se tromper et c’est pour cela que les différentes formes d’appel existent.
Peut-être qu’au lieu de stigmatiser une profession qui exerce un métier très complexe pourrions-nous regarder vers les deux assemblées afin que les Lois votées dans la sérénité et non l’émotion suscitée par un fait divers, fut-il horrible, reflètent bien les évolutions d’une société en mutation permanente. Cela s’appelle l’Equilibre.