A l’invitation de la Société Études Comminges, « L’âge d’or du panorama pyrénéen (1850-1930) » a été parcouru lors d’une conférence à la médiathèque de Saint Gaudens avec Bertrand Gibert, agrégé de Lettres modernes, et Philippe Fermigier, tailleur de pierre, amateur averti d’iconographie pyrénéenne.
Les deux conférenciers ont présenté les personnages, dessinateurs, lithographes, géographes, cartographes qui ont fait connaître les Pyrénées dans la seconde moitié du XIXème siècle, accompagnant et vitalisant le pyrénéisme, une approche intellectuelle de la montagne qui marie le sportif au sensible. Le pyrénéisme plus qu’un sport, une philosophie…
Du mot panorama surgi en 1799 (selon les conférenciers) pour se répandre dans toutes les langues, est naturellement née l’idée de donner corps à ce nouveau genre de représentation, avec des lithographies dès le début des années 1850, celles de Charles Mercereau (1822-1864), Eugène Cicéri (1813-1890), Pierre Gorse (1816-1875) ou Émilien Frossard (1802-1881). Émilien Frossard, pasteur, peintre et lithographe, fut à l’origine de la création de l’observatoire du Pic du Midi dont la construction a débuté vers 1870.
Déclenché par « la révélation des Pyrénées » (selon le mot de Franz Schrader, 1844-1924), l’engouement initialement enflammé de romantisme, est devenu au fil du temps une démarche scientifique. Émilien Frossard était un esprit curieux, ouvert à toutes les disciplines, géologie, botanique, météorologie, agriculture, industrie…
La représentation des montagnes pyrénéennes sous forme de panorama s’est peu à peu rapprochée de la réalité. Les premières représentations ne respectaient pas vraiment (pas du tout) les proportions entre les volumes des monts et la hauteur des pics. Bertrand Gibert et Philippe Fermigier ont ainsi présenté à l’écran les premières lithographies, celles de Charles Mercereau, Eugène Cicéri, Pierre Gorse, Émilien Frossard.
Puis, Émilien Frossard, encore lui, et Émilien Guillemin (1841-1907) ont commencé à dessiner des panneaux orographiques (avec un instrument spécifique appelé orographe servant à dessiner les montagnes) et des « tableaux comparatifs d’altitude » en quête d’exactitude géographique.
Le tourisme prenant son élan, les panoramas ont été dessinés à l’intention des voyageurs, notamment pour le fameux guide Joanne, précurseur des actuels guides bleus.
Ainsi, Victor Petit (1817-1871) a conçu un panorama dépliant pour « guide-itinéraire », Ernest Lambron (1815-1882) et Toussaint Lézat (1804-1884) ont réalisé un panorama complet de la chaîne des Pyrénées, et Édouard Wallon (1821-1895) « un panorama général circulaire ».
« Le panorama du Piméné » réalisé en 1875 par Franz Schrader est considéré par les deux conférenciers comme un chef d’œuvre du genre.
Des travaux remarquables, réalisés à partir des années 1850 par des amoureux de la montagne, passionnés, curieux, autodidactes (Franz. Schrader, inventeur de l’orographe, était initialement employé dans une recette-perception, Édouard Wallon était avocat, Toussaint Lezat géomètre, Ernest Lambron médecin).
Ils ont travaillé dans des conditions souvent difficiles, emmenant leur matériel probablement très lourd à dos de mulet. Ils ont nourri l’envie de découvertes « pittoresques » des voyageurs de l’époque, et donné du souffle au « pyrénéisme », mot créé en 1898 par Henri Béraldi qui en définit ainsi l’idéal : « savoir à la fois ascensionner, écrire, et sentir». Lithographier et dessiner aussi!
Pour en savoir (beaucoup) plus, à la librairie L’indépendante à Saint Gaudens, livre de Bertrand Gibert et Philippe Fermigier: « Relever la montagne », sous titre « panoramas et cartes des Pyrénées », édition Cairn.