A la suite du Grenelle contre les violences intrafamiliales de 2019, des mesures pour renforcer la lutte contre ce fléau social ont été prises : juridiques, éducatives, budgétaires, suivi et sanction des auteurs, protection des victimes. Une formation spécifique a été mise en place pour les militaires de la Gendarmerie. A la communauté de brigades (COB) de Boulogne, l’Isle-en-Dodon et Aurignac, l’adjudant-chef Audrey B. a suivi le stage Expertise violences intrafamiliale (VIF) en janvier à Rosny sous Bois. Devenue référente, elle est apte à former ses collègues.
Qu’entend-on par violences intrafamiliales ?
« On rassemble sous ce vocable l’ensemble des comportements anormaux violents exercés par un conjoint envers l’autre, ou par un ex-conjoint, ou un membre du cercle familial. Elles concernent les enfants, mais aussi les ascendants, les personnes vulnérables. Elles peuvent entraîner hospitalisations, incapacités de travail et aller jusqu’au décès. En ce qui concerne les enfants, j’ai suivi également le stage « Mélanie » pour recueillir la parole des petites victimes. Les VIF sont multiples : physiques, sexistes, sexuelles, psychologiques (chantage, injures, dénigrement, menaces de prendre les enfants…), économiques (suppression des papiers d’identité, de moyens financiers, d’autonomie…). Les femmes sont majoritairement victimes, mais les hommes peuvent l’être aussi. »
Quel en est l’engrenage ?
« D’abord il faut distinguer conflit et violences, dans le 1er cas une solution peut être trouvée. Le cycle de la violence intrafamiliale est connu. Au début l’auteur instaure un climat de tension. Puis on passe aux coups et autres formes d’agressions définies précédemment. Vient ensuite la phase de justification : il se déresponsabilise, rejette la faute sur la victime, la culpabilise. Suit la phase de rémission, avec promesse d’arrêter. Mais ça recommence, crescendo, parfois jusqu’au décès de la victime. »
Êtes-vous confrontée souvent à ce type d’affaires ?
« Oui, quasiment au quotidien, que ce soit pour la Police ou la Gendarmerie. La protection des victimes est vraiment pour nous une priorité d’action. La crise sanitaire et les confinements ont fait progresser les cas recensés en France de façon dramatique. Ici aussi, sur le territoire de la COB, une hausse a été constatée. »
Comment s’articule la formation ?
« Il y a trois niveaux de formation. D’abord à l’école de Gendarmerie, avant de se rendre sur le terrain, les élèves-gendarmes reçoivent un premier enseignement sur cette problématique. Ensuite, des formations spécifiques pour les personnels au sein des groupements, sont dispensées en Haute-Garonne. La Compagnie de Saint-Gaudens y participe, et je suis habilitée à former mes collègues. Enfin, il y a le niveau Expertise VIF, que j’ai obtenu. »
Comment procédez-vous face à une victime ?
« On a appris à gérer la situation, à maîtriser l’enquête, avec des techniques d’audition et d’interrogatoire rodées. J’accueille la personne avec empathie, en instaurant un climat de confiance, de bienveillance et de neutralité. Le premier contact est déterminant, et les préjugés sont bannis. La confidentialité est essentielle. »
« J’ai choisi de devenir référente, conclut l’adjudant-chef Audrey B., car les atteintes aux personnes, dont font partie les violences intrafamiliales, sont une de mes priorités au sein de ma fonction. »
NB : Un nouveau dispositif est mis en place en France, les Maisons pour la protection des Familles, dédiées à la prise en charge de ces affaires.
En 2020, 125 décès (102 femmes, 23 hommes) ; 86 % des faits commis au domicile du couple, de la victime ou de l’auteur.https://www.interieur.gouv.fr/actualites/dossiers/mobilisation-contre-violences-intrafamiliales/
Plate-forme de signalement : www.arretonslesviolences.gouv.fr ; signalement-violences-sexuelles-sexistes.gouv.fr
Numéros utiles : 3919 24h/24 et 7 jours/7 ; 17 : 18 ; 112 ; 15 ; 114 (sourds et malentendants). Association d’aide aux victimes ACCJSE, 2 place Clémenceau 31800 Saint-Gaudens, 05 61 95 24 19