Le sénateur Pierre Medevielle livre ses réflexions à Petite République sur quelques points d’actualité. Membre du groupe Les Indépendants, le sénateur a été maire de Boulogne-sur-Gesse de 1997 à 2017 et conseiller général. Il est, entre autres, vice-président de la Commission d’aménagement du territoire et du développement durable, vice-président de la Délégation au droit des femmes, membre de la Commission des Affaires européennes.
Que pensez-vous du passage obligé des parrainages pour les élections présidentielles ?
« Le système idéal n’existe pas. Mais 500 signatures d’élus forment un filtre. Il fallait bien un moyen de limiter les candidatures disons farfelues. Une douzaine de candidats pour cette élection, ça reste encore raisonnable et c’est un plateau tout à fait crédible. La levée de l’anonymat des parrainages, intervenue sous François Mitterrand, n’est pas une bonne chose. Il peut y avoir des pressions. Beaucoup d’élus, qui ont des convictions extrêmes soit à droite soit à gauche, n’osent pas afficher leur choix. Ça a faussé la règle du jeu et les parrainages sont maintenant plus difficiles à obtenir. D’où l’idée lancée par François Bayrou d’une « banque de parrainages » qui servirait aux candidats « de premier plan ». Par ailleurs on a vu des élus soutenir certaines candidatures simplement pour alimenter le débat, par souci démocratique.
Alors le parrainage doit-il être anonyme ou pas, le maire doit-il rendre des comptes à son conseil municipal et à sa population ? à mon sens, élu démocratiquement, il a le droit de parrainer qui il veut. Et en toute discrétion, ça me paraît préférable. Ça fonctionnait très bien avant la modification. »
Quid de l’abstention massive en France lors des rendez-vous électoraux ?
« A mon avis ce n’est pas vraiment du désintérêt pour la vie publique, seulement les gens ne savent pas pour qui ils votent. Prenons les élections départementales et régionales. Qui connaît les conseillers départementaux et régionaux, qui connaît les compétences des uns et des autres ? A partir de là, la motivation n’y est plus, l’abstention se généralise. C’est un peu différent pour les municipales, même si l’on ne peut nier la désaffection des Français pour les isoloirs. Peut-être davantage de pédagogie, une clarification des compétences de chaque structure, seraient nécessaires. Et les collectivités territoriales feraient des économies. Je cite souvent l’exemple du Comité départemental du tourisme en concurrence avec Comité régional du tourisme, avec pléthore de documentations. C’est un doublon désolant et coûteux. Mais c’est la loi de libre administration des collectivités qui a permis à toutes -de droite ou de gauche- de faire à leur gré en communication. On assiste donc pendant les campagnes électorales à une inflation des moyens de communication, avec l’argent public. Ça frise l’indécence. »
L’élection présidentielle sur fond de crise internationale, quel est votre sentiment ?
« J’espère qu’elle pourra se dérouler dans des conditions normales. Je dois participer à une visioconférence avec des membres de la Commission Défense dans quelques heures, et tout ce que je peux dire pour l’instant, c’est qu’on ne sait pas où on va… L’incertitude est grande. Je rappelle que lorsque la Commission Défense a reçu les diplomates russes trois semaines avant l’invasion de l’Ukraine, ces derniers niaient l’attroupement des forces militaires aux frontières, malgré les images satellites qui le prouvait. La discussion est difficile, voire impossible. A mon sens, l’espoir viendra peut-être de la Chine, qui n’a pas d’intérêt à un embrasement de la planète, et qui pourrait tempérer la situation. Tout cela est vraiment très inquiétant. »