Amélie Vialet, paléoanthropologue et Maître de conférences au Musée National d’Histoire Naturelle de Paris, dirige depuis 2020 un programme de fouilles archéologiques dans la grotte de Coupe-Gorge à Montmaurin. Pour la 3ème phase de ce programme, elle est revenue avec son équipe dans cette cavité, qui fait partie d’un célèbre ensemble de grottes. Explorées au début du XXème siècle, elles ont livré la mandibule humaine, la Vénus de Lespugue, le lion des cavernes… Elles sont tombées dans l’oubli jusqu’à la relance des fouilles il y a deux ans. L’équipe pluridisciplinaire, une dizaine de spécialistes et d’étudiants bénévoles, arrivée en juin-juillet, est sur place depuis le 8 août .
Une dent et un humérus humains, à Sapiens ?
La zone explorée, sur 3 m2 en haut de la grotte, est plus « récente » que les derniers niveaux. Elle date du début du Paléolithique supérieur (- 40 000 ans). C’est l’âge des Aurignaciens, des premiers Sapiens et des derniers Néandertaliens. C’est là qu’une dent supposée humaine (les analyses le diront) et un humérus humain apparaissent sous les pinceaux des chercheurs. Une découverte formidable, qui ouvrent possibilités d’études sur cette période charnière, et dont le retentissement serait immense. « D’une part, relève Amélie Vialet, l’interaction animal-homme est passionnante à interpréter. Soit les hyènes préhistoriques occupant l’endroit ont apporté ces restes, soit des pratiques humaines, rituelles ou autres, les ont laissés. On en est au stade des hypothèses, les études fines apporteront ultérieurement des réponses. D’autre part, s’ils proviennent de Sapiens, et cela seule la datation nous le dira, on aurait affaire à l’Aurignacien. Or fort peu de restes humains proviennent de cette période ! Quel précieux matériel pour mieux connaître l’Aurignacien en termes d’évolution biologique ! » Autre récolte, une lame taillée dans du silex, de la même période. Pierre, étudiant, heureux découvreur de l’humérus, traduit le sentiment de chacun sur le chantier : « On a l’impression d’être un chercheur d’or qui trouve une pépite d’or dans sa bâtée ! »
Des ossements d’animaux
En juin-juillet, lors de l’arrivée de l’équipe, des ossements parfois très complets ont été trouvés sur ce sol occupé par les grands carnassiers, comme les hyènes. Ont été aussi collectés un os de rhinocéros, une côte d’ours de 50 cm de long, un large morceau de crâne d’ours, une dent de cheval, …. « Cet endroit, pourvu en os fragmentés ou plus complets, est typique des repaires de l’Hyène préhistorique. Elle y traînait les carcasses qu’elle dévorait, souvent en broyant les os. »
Un territoire aux potentialités immenses
La provende actuelle s’ajoute aux collectes des 2 années précédentes, issues d’un intense travail de géologie, archéologie, anthropologie, paléontologie. Tous les fossiles (lavés, triés, répertoriés, étiquetés tous les soirs au labo de campagne au bord de la Save) seront comme d’habitude, envoyés au laboratoire de Tautavel où ils sont étudiés. Une synthèse sera envoyée aux services de l’État concernés, pour reconduire le programme trisannuel. De longues années de recherches passionnantes et d’études approfondies sur ce territoire prometteur, se profilent à l’horizon.
https://www.lesgrottesprehistoriquesdemontmaurin.com/