Depuis près de vingt ans, Thomas Delebecque consacre sa vie à redonner vie au moulin de Saman, sur les rives de la Save. Il est cette année un des lauréats du Budget participatif de la Région Occitanie, qui lui a accordé une aide de 40 000 €.
Le contexte
Le moulin à eau de Saman avait, de 1877 jusqu’à la fin du XXème siècle, alimenté en électricité une partie du canton boulonnais, dont l’ancienne tuilerie de Blajan. Tombé en désuétude dans les années 90, il est devenu un poids financier pour la commune qui ne pouvait assumer l’entretien de ce patrimoine auquel elle tenait et qu’elle ne voulait pas voir disparaître. Thomas a alors proposé son projet, relancer l’activité du moulin en y associant une entreprise de maraîchage bio sur les six hectares de l’emprise. Avec la création d’une SCI et la signature d’un bail emphytéotique avec la municipalité, le moulin pouvait espérer une inespérée renaissance.
Un énorme chantier
Venu de sa région du nord pour s’installer ici et se consacrer au moulin, Thomas a accompli des travaux de rénovation très importants. Les maraîchers Benoît et Armelle l’ont rejoint en 2008 officialisant leur exploitation en 2012. « Depuis ce temps, je passe 80% de mon temps libre et 100% de mes finances à ce projet. » Réhabilitation progressive du bâtiment et des turbines, achat de matériel, remise aux normes, nettoyage, débroussaillage, le chantier est immense.
Le parcours du combattant
La subvention qui apporte une aide bienvenue, bien que fractionnée dans le temps et soumise à des dépenses engagées par Thomas, date de début 2023. Depuis Thomas a embauché un bureau d’études, mais il n’a toujours pas d’autorisation d’entamer des travaux de la part de la DDT 31 (Direction départementale des Territoires). « C’est long. Je bataille depuis longtemps pour que les contraintes imposées sont bien respectées, tout est dans les clous. Notamment en matière de respect environnemental, avec l’installation d’une passe à poissons spécifique obligatoire. Mais hélas, à chaque fois, une nouvelle exigence survient. Au printemps, il a fallu que je fasse intervenir un écologue pour compter les pipistrelles car pas question de déranger ces petites chauves-souris qui s’abritent dans le moulin ! Et à chaque fois ce sont des frais en plus, importants. » Fort heureusement le rapport de l’écologue est positif, pas de problème majeur. Mais au fur et à mesure, Thomas a l’impression de subir ce qui lui semble l’obstination des services administratifs à l’empêcher d’agir. « Le moulin est un gouffre, un vrai tonneau des Danaïdes. Et grever mon budget pour payer un bureau d’études à 20 000 €, comme on me le demande, ne fait pas mon affaire. »
« Il y a une dichotomie flagrante, reprend Thomas Delebecque, entre le message politique de favoriser les énergies renouvelables, et les freins imposés aux divers porteurs de projets partout. Ça n’est pas cohérent. L’axe majeur et la finalité de mon projet, c’est l’indépendance énergétique et alimentaire locale. Au niveau maraîchage c’est accompli, avec une cinquantaine de familles nourries sur le territoire. Mais pour l’énergie renouvelable, ça coince encore. Malgré les fluctuations du monde qui refondent la vision énergétique globale, l’administration n’évolue pas et continue à mettre des bâtons dans les roues. »
Le dossier déposé en juin devrait avoir une réponse en automne, pour l’autorisation de travaux, Thomas reste optimiste. « Je n’ai pas fait tout ce travail pendant toutes ces années pour abandonner. Mais c’est dur. Dur de voir que malgré la vertu d’un projet qui va dans le sens du développement durable, on a les plus grandes difficultés à toucher au but. » Malgré les difficultés, Thomas Delebecque garde l’espoir qu’un jour il enclenchera les turbines de son moulin, pour produire de l’électricité à Saman et vivre enfin de sa passion.