Le monde agricole connaît une crise de la transmission des exploitations dans la majorité de ses secteurs, et pourtant ce volet constitue un enjeu majeur pour l’avenir des territoires. En Haute-Garonne, près de la moitié chefs d’exploitation sont âgés de plus de 55 ans et seront en retraite dans les 10 prochaines années. Une grande partie d’entre eux ne savent pas à qui ils pourront transmettre leur ferme. Paradoxe, les candidats à l’installation sont de plus en plus nombreux. Pour mettre en relation les deux parties, l’ADEAR 31 (Association pour le Développement de l’Emploi Agricole et Rural), développe plusieurs outils, de l’accompagnement individuel aux formations collectives ou aux temps de rencontre. C’est le but des Cafés paysans de l’ADEAR 31, où chacun vient s’exprimer et partager expériences et conseils entre cédants et porteurs de projets. L’appui d’une structure d’accompagnement se révèle précieux, car la transmission repose sur une foule de critère tant techniques qu’économiques, juridiques, administratifs ou humains.
A Mondilhan mardi 19 septembre, le Café paysan s’est tenu chez Lionel et Françoise Ferrère, éleveurs en bovins laitiers bio, cédants et retraités. Autour de l’animatrice Margot Calluaud, une douzaine de participants se sont retrouvés pour échanger sur ce thème de la transmission en élevage, dont quatre jeunes futurs agriculteurs prêts à se lancer dans cette aventure. Mathias et Benoît Ferrère étaient là pour témoigner de leur expérience et répondre aux questions, l’un ayant repris la ferme familiale et l’autre une exploitation voisine.
Fondée en 1980 avec l’achat de 20 hectares de terre, l’exploitation de Lionel et Françoise Ferrère produisait des céréales, avec des porcs et des vaches laitières. S’agrandissant avec un autre corps de ferme et 40 ha de plus fin des années 90, l’exploitation double sa production de maïs. Autour de 2010, des problèmes sanitaires combinés à la crise du lait plongent la ferme dans des difficultés qui nécessitent une clause de sauvegarde (soutien juridique de la gestion de l’exploitation). Le choix de changer de système agricole intervient en 2017 pour passer en élevage laitier bio, avec plus tard un cheptel de vaches Jersiaises plus adaptées aux coteaux commingeois. En 2022, Lionel prend sa retraite, bientôt suivi par Françoise, et leur fils Mathias reprend l’exploitation à son compte. Exemple parfait de transmission familiale.
Quant à Benoît, leur second fils, il a repris l’élevage d’Antoine Viviès à Péguilhan, et s’installe progressivement en bovin viande. Leurs expériences ont apporté un éclairage constructif pour les quatre jeunes porteurs de projet, deux garçons et deux filles, sur les contraintes administratives, le parcours des démarches, les sonnettes à tirer, le dossier à monter, les finances à apporter, etc. Ensuite au fil des années, avec le recul sont soulignées les petites erreurs et les bons choix, ce qui peut être utile aux futurs repreneurs. Le Café paysan est un moyen convivial de réaliser si les objectifs personnels sont en adéquation avec la situation réelle, pour réaliser des choix stratégiques pertinents et durables pour sa ferme (choix techniques, organisation du travail, investissements, commercialisation).
Pour les NIMA présents (Non Issus du Milieu Agricole), un paramètre très important entre en ligne de compte, la solidarité, la convivialité qui irrigue les territoires ruraux, où les gens se connaissent et n’hésitent pas à se souder autour de celui qui rencontre des difficultés dans son exploitation. Ce qui peut alléger un peu l’inquiétude légitime des porteurs de projets au moment de se lancer. Dans le monde agricole, il faut une réelle passion et une volonté de fer pour réussir dans le métier en élevage, et c’est le cas des jeunes porteurs de projets autour de la table.
Même si le constat est là, les cédants sont globalement en manque de repreneurs, la situation évolue. Les structures comme l’ADEAR 31, qui défendent l’agriculture paysanne à échelle humaine, soutiennent les projets. L’élevage en bio attire malgré les contraintes et les revenus souvent insuffisants. Les jeunes -et moins jeunes-, NIMA ou pas, sont séduit par passion, par philosophie, pour la qualité de vie, la vie de famille, un retour à la terre ou bien pour perpétuer une tradition familiale.
Après la discussion chaleureuse et instructive, tous se sont retrouvés autour d’une collation sympathique, pour prolonger de façon gourmande ce passionnant Café Paysan de l’ADEAR 31 chez Lionel et Françoise à Mondilhan.