Les annonces du premier ministre Gabriel Attal en Haute-Garonne, pour éteindre l’incendie paysan national allumé il y a une dizaine de jours à Carbonne, ne satisfait pas tout le monde, loin de là. Pour rappel, le chef du gouvernement prévoit de simplifier les normes et démarches administratives, de faire respecter la loi Egalim, de stopper la hausse du gazole non routier (GNR), de débloquer une enveloppe d’aide d’urgence à la filière bio et aux éleveurs victimes des dégâts de la MHE ( maladie infectieuse bovine), parmi d’autres mesures que d’aucuns qualifient de « mesurettes ». Car le monde paysan en colère ne l’entend pas de cette oreille, bien qu’une partie de la profession se soit satisfaite de ces premières avancées. La grogne ne retombe pas pour autant et les regards se tournent maintenant vers Paris, objectif ultime de la lutte avec un possible blocage à partir de lundi.
Laurent Miro, éleveur de bovin viande en bio à Montmaurin et membre d’Europe Écologie les Verts, livre son analyse : « Ces annonces, malgré l’enveloppe votée à la bio, nie l’évidente nécessité de l’écologie dans l’agriculture d’aujourd’hui. C’est elle la grande perdante dans cette affaire. En tant qu’écologiste militant ça me désole. Le monde paysan est accroché à l’enclume syndicale qui nous tire vers le fond.
Il faut être clair et faire son choix : il y a une agriculture qui pollue, et une agriculture qui ne pollue pas. Dans le système actuel elles sont réunies dans un marasme commun. Les mesures annoncées par le gouvernement prennent essentiellement la défense des pollueurs, on fait encore un pas en arrière.
Pourtant les propositions écologistes sont nombreuses, simples, concrètes et efficaces. Un exemple parmi elles, rehausser le plancher du forfait agricole en matière d’imposition (NDLR : Les revenus d’origine agricole sont imposés dans la catégorie des bénéfices agricoles, avec plusieurs régimes d’imposition, le forfait, le régime réel simplifié et le régime réel normal). Ce qui sortirait beaucoup d’entre nous des contraintes de gestion et de fiscalité. Les aides à la conversion ont été rapidement rabotées, ce qui a mis un coup d’arrêt, d’après moi nous serions plus de 25 % dans la région à travailler en bio. Quant aux 50 millions, il se peut comme d’habitude qu’on les attende longtemps… tout ça c’est de la politique politicienne.
Entendre que les normes environnementales et écologiques, qui protègent la santé publique, sont une des causes du mal-être du monde agricole, est pour moi une aberration et un non-sens. C’est de la manipulation pure et simple. Je regrette de voir que des jeunes gens qui se battent pour sauver la planète, faire prendre conscience du réchauffement climatique, des dangers de l’agrochimie et des risques sur la santé publique, sont parfois malmenés par les forces de l’ordre, alors que les agriculteurs manifestants sont escortés par elles… il y a vraiment là deux poids deux mesures.
L’Europe ayant voté le maintien du glyphosate, chacun doit prendre ses responsabilités. Autrefois le paysan qui utilisait la chimie comme on le lui recommandait, ne savait pas les risques et les implications. Maintenant on sait, on doit faire son choix et l’assumer. Mon intime conviction c’est que l’écologie est l’avenir de l’agriculture, on ne pourra pas aller contre la marche du progrès. »