Blocage total des gorges de la Save, la population s’insurge et se mobilise

Salle comble pour la réunion publique à Lespugue contre la fermeture totale des Gorges de la Save.
Salle comble pour la réunion publique à Lespugue contre la fermeture totale des Gorges de la Save.

Salle comble à l’appel de la population vendredi 2 août à Lespugue, pour la réunion publique contre la fermeture totale des Gorges de la Save. Ce lieu touristique emblématique du Nord-Comminges, célèbre bien au-delà du territoire, riche d’un patrimoine historique, archéologique et naturel d’exception, est situé sur les communes de Lespugue et Montmaurin.

Historique de la fermeture

En 2015, les services du Conseil départemental de la Haute-Garonne ont décidé d’interdire aux voitures la route RD9g qui traverse le site sur environ 3 km, pour des raisons de sécurité, le réservant aux piétons et aux deux-roues. En 2018, l’interdiction s’étend à ces derniers. Mais les promeneurs locaux sont très attachés aux Gorges et ont continué à le fréquenter. « Nombre d’entre nous, disent-ils, y ont joué et grandi, les familles y ont passé des moments de bonheur et de détente, les pêcheurs trempaient leur ligne, les vélos arpentaient les méandres le long de la rivière bordée de hautes falaises. »

En février 2022, un projet du CD 31, présenté à la Communauté cœur et coteaux du Comminges, prévoit la réouverture du site, mettant en avant le patrimoine historique, archéologique et naturel, avec des perspectives de protection, de découvertes scientifiques, de valorisation. La zone a été classée en Espace Naturel Sensible pour pouvoir faire les aménagements nécessaires. « Malgré les interventions répétées des conseillers départementaux Céline Laurenties et Jean-Yves Duclos, martèle J.F. Foix, les promesses n’ont pas été tenues. »

Les arguments du Conseil départemental

Des études diligentées en 2006, 2014, 2019, 2020 et 2023, ont évalué les risques de chutes de pierres, de blocs, d’arbres et de petits glissements de terrains généralisés sur l’ensemble du secteur géographique concerné. Ces études mettent en évidence une augmentation régulière du niveau de danger, désignant plusieurs secteurs à risque « faible, moyen ou élevé ». Selon les renseignements fournis par le conseil départemental à notre rédaction, le dernier rapport en date effectué par un bureau d’études indépendant fait état d’une situation d’urgence due à un grave risque de décrochage de roches. Le président du conseil départemental prend alors les mesures de sécurité urgente qui s’imposent au vu de l’aggravation de la situation.  Ainsi qu’il est mentionné dans le communiqué du CD 31 du 23 juillet 24, « les dispositifs déjà mis en place n’étant pas bien respectés, d’ici la fin du mois de juillet une fermeture par blocs béton à une extrémité et un portail à l’autre extrémité est destinée à éviter les incivilités et la mise en danger des personnes en empêchant l’accès au site. »

Un mur qui fait mal

Depuis le 26 juillet, un mur de béton et un portail interdisent totalement les Gorges. Les panneaux de signalisation ont été enlevés. Stupeur et colère dans le pays. Aussitôt un collectif est créé. A la table de la réunion publique du 2 août à Lespugue, cinq intervenants : Nathalie Rouquerol, scientifique spécialiste de la Préhistoire et porte-parole du mouvement, Jean-François Foix maire de Lespugue, Céline Laurenties conseillère départementale et maire de Péguilhan, Roland Sabathé éleveur à Lespugue, Gabriel Amiel, maire de Montmaurin.

Les réactions sont à l’aune du choc ressenti : « Ce mur est l’expression de la violence qui s’abat, mais pas de la résignation, relève Nathalie Rouquerol, le total déni d’un lieu mondialement connu, phare de notre lointain passé, le souverain mépris de la population locale. » D’autres diront « on m’arrache les tripes », « c’est devenu une prison », « c’est le mur de la honte », « je ne peux circuler dans une partie de ma commune, je ne le supporte pas », etc. Les maires rappellent qu’aucun incident majeur n’est intervenu sur le site depuis des décennies.

L’émotion palpable dans la salle monte d’un cran à l’écoute de l’intervention du président du CD 31 Sébastien Vincini, de Maryse Vezat-Baronia et d’autres élus départementaux, le 26 mars 24, annonçant l’impossible réouverture du site et la probable destruction de la maison du bord de Save, « pourtant récemment achetée par le CD31 avec l’argent public » précise un participant. « Le dossier Gorges de la Save expédié en 13 minutes chrono », assène Mme Rouquerol.

La mobilisation

La conseillère départementale d’opposition Céline Laurenties précise que le comité de pilotage prévu par le CD31 n’a pas encore vu le jour, elle propose de demander au président Vincini de se déplacer sur le site des Gorges, « pour constater l’aberration de cette fermeture. Si le risque existe, il faut traiter le problème or rien n’a été fait dans ce sens depuis 2015. Une solution doit être trouvée pour rouvrir ce site, essentiel à l’offre touristique du territoire, complémentaire du musée et des sites archéologiques de Montmaurin. »

Une feuille de présence a circulé dans la salle pour recueillir les noms de ceux qui souhaitent participer au collectif que se met en place. Une pétition est prévue. L’idée est émise de faire basculer la compétence de gestion du site du CD 31 aux communes concernées. Une manifestation des élus devant la Préfecture est proposée en septembre. « Il faut montrer qu’on est là et que le sacrifice de ce site n’est pas acceptable. » Le directeur du Parc Naturel Régional (PNR) Barousse-Comminges-Pyrénées, Philippe Terrancle, affirme que le classement ENS (espace naturel sensible) et son plan de gestion par les communes, pourraient être la solution pour imposer un cheminement doux en lieu et place de la route départementale. L’idée de transformer la voie en chemin communal est applaudie. Les élus de la Communauté de communes cœur et coteaux du Comminges seront appelés à manifester prochainement devant le mur des Gorges.

« Rendons les Gorges de la Save non pas à seulement à Montmaurin ou à Lespugue, conclut Jean-François Foix, mais à tous les citoyens et touristes qui ont le droit de s’y promener sans contraintes, pour profiter de ce patrimoine exceptionnel et inaliénable. »

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