Blonde et souriante, Chantal Lahaye est aux manettes du projecteur depuis près de 28 ans, dans le petit cinéma d’art et d’essai de Cizos, le Cinéma le Magnoac. Aux portes de Boulogne, cette salle intime et chaleureuse est une institution dans toute la région. Et sa projectionniste en est la cheville ouvrière, appréciée de tous.
« J’ai quitté ma Belgique natale pour me marier, confie-t-elle, ce qui a interrompu mes projets d’exercer en tant que professeur de lettres. Au bout d’une quinzaine d’années j’ai dû trouver un travail, mon ex-mari étant malade. J’ai été engagée comme caissière au cinéma Le Magnoac, géré par la communauté de communes Pays de Trie et du Magnoac. J’assistais le projectionniste. Lorsqu’il a eu des problèmes de santé, je me suis proposée pour le remplacer de façon sporadique. Mais dès que j’ai touché le projecteur, c’est devenu ma chose (rires). »
Cinéphile depuis toujours, Chantal parfait sa formation auprès du Parvis de Tarbes, structure culturelle qui approvisionne un circuit de 14 cinémas Haut-Pyrénéens. Puis à Toulouse elle décroche son CAP de projectionniste. Chantal a connu les pellicules argentiques, les bobines à enrouler et dérouler, mais depuis quelques années, l’avènement du numérique a changé le protocole. Un disque dur à brancher dans un port USB et le tour est joué.
« Si certains se sont désolés de ce fait, pas moi. En effet ça me permet de continuer plus longtemps mon métier ! Porter des bobines de 25 ou 30 kg, les monter au 1er étage, les charger dans la voiture, les amener à Tarbes ou Lannemezan, ce n’était pas facile. »
« Mais avec l’argentique, c’était animé ! reconnaît Chantal. Pendant les séances, le vieux projecteur hors d’âge s’arrêtait, ça cassait le film. Je me souviens d’un jour où un groupe scolaire était venu voir un film sur Che Guevara, les enfants n’ont jamais pu le visionner ! le film cassait tout le temps. Le vieux clou a été remplacé par un appareil neuf, qui est toujours à l’étage. Et qui pourra fonctionner encore dans 50 ans ! »
Les années passant, Chantal arrive au bout de sa carrière, mais elle n’a pas encore envie de donner le clap de fin. Comme tous les jours, elle ouvre la porte vitrée du hall de son cher cinéma, se glisse derrière le bureau et accueille avec sa gentillesse coutumière les premiers spectateurs, avant de monter à l’étage lancer le film. C’est le scénario de sa vie, celui qu’elle a choisi, qu’elle souhaite prolonger le plus longtemps possible, et qui fait son bonheur.