Mythique Porsche.
On a beau se souvenir, Saint-Gaudens affiche un passé historique automobile peu commun, fabuleux, quand bien même, le temps a effacé les traces de ceux qui ne les cherchent plus. Le Grand-Prix du Comminges est tombé dans les oubliettes. Mais pour d’irréductibles Commingeois, héritiers d’une autre époque, la passion demeure.
Pierre Debauges est de ceux-là. Et le Garage Concept Store qui garde en annexe une vitrine de prestigieuses automobiles en plein centre ville dénote franchement avec celles des autres commerces, raréfiés, qui subsistent comme ils le peuvent sur une place paupérisante. Le show room est discret, les trois grandes vitres sans éclairage alléchant dissimulent pourtant la partie émergée d’un trésor fabuleux, quelques bribes de la collection d’un passionné quinquagénaire, un homme mordu, enthousiaste sur le sujet, qui cherche à vivre de son commerce sans jamais afficher de prix, un spécialiste expérimenté rompu à une clientèle internationale spécifique qui sait que ce qui est rare et beau est cher, ou pas.
La clientèle du Garage Concept n’est certes pas saint-gaudinoise mais son public l’est assurément. Les seuls initiés savent comment se délecter les mirettes, à coller les mains sur la glace, le nez sur le carreau, les yeux écarquillés plongés dans l’antre. Le laveur de vitres en témoigne. L’échantillon de cinq ou six véhicules exposés varie fréquemment, il rend compte de ce qu’est le magnifique, sans même que l’exclusivité de l’image ne s’associe aux bruits et aux odeurs si caractéristiques.
Depuis une semaine, la caverne soumet aux curieux une œuvre d’une autre époque, une Porsche 356 rouge décapotable aux chromes rutilants, un roadster de 1962 préservé dans son écrin neuf. L’auto se démarque des 2900 modèles produits par la gamme allemande des dénommés Speedster minimalistes carrossés initialement par Drauz-Werke. Le Roadster fait partie des seules 356 estampillées d’Ieteren sorties magnifiées de la carrosserie bruxelloise dans le début des années soixante. Dans cet état là, il n’en existe aucune autre. Les vitres des portes latérales qu’elle possède exclusivement n’empêchent guère les chevelures de ses passagers d’onduler au vent. L’auto est légère et ses 95 cv la propulsent impudemment. Elle ronfle. Fermez les yeux, non James Dean n’est pas à vos côtés. Ressentez, ce furent là sans doute les dernières sensations de l’acteur. Et sa Porsche est devenue mythique.